J'ai testé pour vous... la Manifiesta

Ce 19 septembre à Bredene, c'était déjà la sixième édition de Manifiesta, la fête de la solidarité du PTB. Il y avait le ciel, le soleil et la mer, et aussi la toute grosse foule (13 000 personnes d'après les chiffres du PTB), des débats, des concerts, des films, des animations pour grand/e/s et petit/e/s, des cars de réfugié/e/s et des enfants du monde, du peket et des mojitos, des falafels et des moules-frites, la possibilité de s'initier à la boxe, de défier des champions d'échecs, de s'essayer au karaoké ou encore, de recharger ses batteries pour les luttes sociales à venir.

Ma première Manifiesta, c'était l'an dernier, pour une invitée de marque que je ne voulais pas rater, Angela Davis. J'avais apprécié, en passant, la diversité du public, en âge, en origine sociale et culturelle, la diversité des activités proposées aussi. Ce qui m'a donné envie de revenir cette année.

Certes, je n'ai fait que « picorer », beaucoup de débats intéressants se déroulant forcément en même temps, sans compter que j'ai profité de la proximité de la mer pour aller respirer un bon coup. Et pour couper court à toute discussion inutile (les discussions utiles étant bien entendu ouvertes), je sais bien qu'il y avait probablement là, parmi ces milliers de personnes, des gens avec lesquels j'ai de profonds désaccords, avec qui je pourrais me confronter un jour, politiquement comme humainement. Je n'idéalise pas cette manifestation ni ses participant/e/s, je peux juste constater que, parmi les différentes "fêtes" ou "rencontres d'été" organisées par des partis "progressistes", c'est là que je me sens le mieux.

Pas de « compte-rendu » donc, juste une impression de dynamisme, d'espoir en des temps plutôt sombres, avec des discours pugnaces de syndicalistes ainsi que de Peter Mertens (pour le PTB) ou de Natalie Eggermont (pour le Cimate Express), entre autres. Juste un petit clin d'oeil aux très recommandables Monique et Michel Pinçon-Charlot, les auteurs de « La violence des riches » ou « Les ghettos du gotha », réussissant le tour de force d'être aussi pédagogues que drôles sur les sujets aussi peu « sexy » que la fraude fiscale ou le communautarisme des classes dominantes. En plus, la complicité entre eux deux m'a toujours touchée, loin des "grandes messes" que sont si souvent les conférences sur des sujets graves.

D'autres parleront donc mieux que moi des moments forts. Ce que je peux apporter, c'est mon regard féministe, pour un parti qui semble avoir pris conscience (notamment dans les textes de son congrès) qu'aucune avancée sociale ne se fera sans les femmes, mais qui a encore beaucoup de chemin à faire.


Première remarque : le « moment central » de 17h, avec les interventions précédent le « discours du président », échappait au piège de « l'unisexe » que l'on rencontre dans tant de tribunes. Sans chercher une parité absolue, on a entendu des hommes et des femmes, et au-delà des proclamations de bonne volonté et d'égalité, c'est en soi un signe important. Beaucoup de visages de femmes aussi dans le programme, dont j'avais dénoncé au départ l'aspect trop masculin (il s'est quelque peu rééquilibré depuis).

Deuxième point : Marianne, le mouvement des femmes du PTB, proposait ses propres animations. Une tente fort à l'écart, au bout d'une allée, mais tout de même bien fréquentée pour ce que j'en ai vu. Par contre, la vente de foulards, la proposition de glaces, café et petits gâteaux... ça ne brillait pas par l'audace. J'ai participé aux tables rondes de l'après-midi, sur le sexisme, la diversité et l'austérité. Difficile de s'entendre dans une ambiance très bruyante, juste à côté de la scène principale où il y avait un concert en même temps. Mais surtout, des discussions très « basiques », avec (à ma table) le coup classique de l'homme qui réussit à attirer toute l'attention sur lui et à centrer les débats sur la réfutation des énormités qu'il profère (pour la petite histoire, je me suis fait un plaisir de le faire taire en faisant remarquer qu'on assistait là, précisément, à une forme très classique de sexisme). J'aurais aimé qu'on parle, par exemple, du sexisme à l'intérieur des organisations de gauche. Pas eu le temps.

Comment faire autrement ? On pourrait imaginer de placer la tente de Marianne au milieu de la fête, en tout cas dans un endroit plus visible (près de la vente de tickets repas/boisson, par exemple), organiser des débats féministes beaucoup plus larges ou mieux encore, veiller à un regard féministe systématique dans les débats plus généraux (que ce soit sur l'austérité, la réduction du temps de travail, la culture...) Mais pour cela, il faudrait sans doute une nouvelle dynamique pour le mouvement des femmes au sein du PTB, et beaucoup plus de liens avec les groupes de femmes en dehors, dans les combats communs.

Et enfin, un point de détail, mais qui a son enjeu symbolique : parmi les (innombrables) propositions pour les jeunes, une « initiation à la boxe » qui proposait de découvrir ce sport « avecles filles et les garçons de la Belgian Boxing Association ». Pour un sport comme la boxe, mentionner les filles a son importance, histoire de sortir des stéréotypes. Les quelques fois où je suis passée devant le lieu de l'animation, je n'ai vu que des garçons (il se peut bien sûr qu'il y ait eu des filles que je n'ai pas vues). Alors, une suggestion ? Faire un pas de plus en proposant explicitement un horaire réservé aux filles, pour les inciter à franchir le pas. Cela ne marchera peut-être pas du premier coup, mais ce serait un signal intéressant.

Globalement donc, une volonté de « bien faire », même si on est encore loin, par exemple, de l'Université de Printemps de la LCR, où le meeting central du samedi soir peut être consacré au féminisme. Mais la réflexion est apparemment lancée, à vérifier dans les faits (lors des meetings dans les régions, beaucoup de tribunes restent encore 100% masculines, ce que je me fais un devoir de souligner, au risque d'en énerver quelques-un/e/s...)

A l'année prochaine donc !

Mis à jour (Lundi, 21 Septembre 2015 09:57)