Saint-Josse, patron de la diversité

« Uniforme: qui est toujours le même, où l'on n'aperçoit aucune diversité » (1699, Boileau)

(Le Robert historique de la langue française)

 

On a beau dire que notre enseignement va mal, que les inégalités y sont abyssales, que les enquêtes Pisa nous attribuent un bonnet d'âne, que c'est une priorité absolue (d'avant les élections, parce qu'après, on parle surtout d'économies à réaliser) : il est quand même rassurant de constater que certains n'hésitent pas à mouiller leur chemise, ou leur uniforme, pour chercher des solutions à la fois simples, peu coûteuses, et qui arrivent pratiquement à faire l'unanimité (contre elles) !

Tenez, prenez cette décision du Conseil Communal de Saint-Josse, qui a l'honneur d'être à la fois la plus petite et la plus multiculturelle des communes bruxelloises. Eh bien ! Ce n'est pas parce qu'on est petit qu'on n'a pas le droit d'innover ! Grande première donc dans l'enseignement officiel francophone, un code vestimentaire sera imposé dès la rentrée au lycée Guy Cudell. Longueur de la jupe – sous le genou –, couleur du pantalon – bleu marine, pull pou cardigan assorti, chemisier ou polo blanc. Interdiction des baskets, piercings ou tatouages, casquettes, bonnets, gants et vêtements amples. La barbe courte comme le maquillage discret sont autorisés. La coiffure, elle, doit être classique. Très précis, comme on le voit... Ben oui, c'est une bonne préparation pour travailler chez EuroDisney, célèbre pour ses règlements sur la dimension des bijoux et la longueur des cheveux...

Les premiers à s'étrangler ont été les laïques les plus pointus, sur le thème « quoi, on interdit la casquette et on autorise le voile » ? Un peu comme si on avait autorisé le maillot de Neymar tout en bannissant celui d'Eden Hazard. Parce que oui, l'interdiction du voile n'est pas passée, et ça, c'est franchement un soulagement, parce que cette école est l'une des dernières à l'autoriser en région bruxelloise et qu'une nouvelle interdiction ne pourrait favoriser qu'une chose : le repli sur des écoles musulmanes, ce qui me paraît (tout en étant un droit) bien plus dommageable pour le vivre ensemble et l'émancipation des filles qu'un bout de tissu sur la tête.

Mais j'ai bien d'autres objections.

 

Mis à jour (Mardi, 24 Juin 2014 15:04)

 

Mal à (De)lhaize

Ce n'est plus vraiment un scoop : chez Delhaize, 14 magasins sont promis à la fermeture, 2500 emplois menacés de disparition et les autres, tout aussi menacés mais « seulement » de baisses salariales ou de plus mauvaises conditions de travail. Certians médias titrent sur un « bain de sang social ». D'autres, surtout les financiers, ceux qui aiment nous donner à nous, pauvres ploucs et ploukettes, des leçons de responsabilité, reprennent froidement l'annonce de la direction : une décision qui garrotte le futur de milliers de personnes, ça s'appelle un « plan d'avenir ».

Juste pour aggraver votre nausée, je vous livre cet extrait de l'Echo du jour : « A la Bourse de Bruxelles, les investisseurs saluent actuellement les choix difficiles pris par la direction du groupe Delhaize. Vers 12h30, l’action grimpe de 1,42% à 52,96 euros. En travaillant sur ses coûts tout en continuant à investir, Delhaize a présenté ce mercredi matin des " mesures extrêmes " que les "actionnaires adorent ", explique Pierre-Alexandre Billiet, professeur à la Solvay Business School et administrateur délégué de Gondola, la plate-forme du secteur de la distribution. » La plateforme porte bien son nom, Gondola : en effet, de quoi se gondoler.

Mais alors, nous les ploucs et ploukettes, que pouvons-nous faire ?

Mis à jour (Mercredi, 11 Juin 2014 18:01)

 

Pride, arrête ton char !

Autrefois, nous étions des allié/e/s. Nous étions uni/e/s contre l' « hétéropatriarcat ». Vous étiez présents à nos côtés quand nous manifestions pour le droit à l'avortement et avec nous, vous envahissiez une église où l'on célébrait un mariage, aux cris de « Libérérez la mariée ! » (1971).

Les temps ont changé. Notre fougue révolutionnaire a pris un coup de vieux, et notre prétention à changer le monde, pour les hommes comme pour les femmes, pour les hétéros comme pour les homos, s'est transformée en revendication tiède et libérale d' « égalité des chances ». Le « Rapport contre la normalité » a été remplacé par son contraire, une soif d'être comme les autres, d'avoir le droit de faire l'amour comme la guerre, de donner son sang pour la transfusion comme pour la patrie (ou le capital). En réponse aux tragédies de l'épidémie de sida, vous avez revendiqué le mariage, notre ennemi commun d'hier. Et quand nous continuons à réclamer le droit de choisir nos maternités ou d'être des personnes à part entière par l'individualisation des droits sociaux, vous n'êtes plus là. Et pourtant, de notre côté, quand il a fallu s'opposer en France aux réacs de la « Manif pour tous », même les plus allergiques au mariage étaient dans la rue avec vous.

Mais soit, nous nous sommes séparés, on peut le regretter mais cela n'avait en soi rien de tragique. Jusqu'à ce que les choses se gâtent pour de bon.


Mis à jour (Vendredi, 09 Mai 2014 11:43)

 

Impressions de Copenhague

Du 15 au 20 mai dernier, nous avons fait un saut à Copenhague, la ville où, paraît-il, le degré de bonheur est le plus élevé du monde... En plus il faisait beau : que demander de plus ? Un peu moins d'extrême-droite, peut-être... ?

La première chose qui frappe en arrivant à Copenhague, c'est... qu'on y respire. Avec comme instrument de mesure une asthmatique, la conclusion est irréfutable : degré de pollution très limité pour une grande ville. Dès qu'on quitte la gare pour aborder les larges avenues, on comprend cet agrément : les vélos sont bien plus nombreux que les voitures. Si le système de vélos gratuits a récemment été abandonné – dommage ! - les boutiques de location sont nombreuses et se déplacer à deux roues est un plaisir dans une ville tout à fait plate, où beaucoup de vélos ne sont même pas équipés de vitesses. Voilà le résultat d'une politique volontariste : sans être rares, les voitures sont sages, roulent prudemment (à part quelques fous comme partout), laissent la priorité aux vélos qui eux-mêmes, gênent peu les piétons. Chaque catégorie dispose de son espace propre et la plupart des Danois semblent respecter les panneaux.

Ce qui frappe ensuite, c'est la décontraction et la gentillesse des gens. A chaque fois que nous nous arrêtions pour déployer la carte de la ville, il se trouvait quelqu'un (en général quelqu'une d'ailleurs) pour nous demander en anglais si nous avions besoin d'aide. Les vendeur/se/s étaient serviables et patient/e/s, même dans les toutes simples baraques à hot-dog. L'une de ces dames, scandalisée parce que nous déclinions sa sauce remoulade (spécialité danoise, comme son nom l'indique) nous l'a carrément fait goûter. On se serait presque cru dans un resto gastronomique.

Même le personnel des guichets, qui a généralement (et pas toujours à tort) mauvaise réputation, nous a accueillies avec amabilité, par exemple à la gare, prenant le temps de nous indiquer les meilleurs tarifs et nous expliquer patiemmment le système complexe des « zones » et des billets 24h. Il faut dire que le personnel est nombreux, que le système fonctionne avec des tickets (ce qui évite de s'énerver parce qu'on a évidemment choisi la file la plus lente) et que si personne ne semble glander, le travail se fait apparemment sans stress.


Mis à jour (Mercredi, 04 Juin 2014 13:30)

 

La solidarité, c'est pour les pauvres

L'information est tombée le soir du 30 avril, veille du 1er mai : le Sénat français a adopté le don de jours de repos à un collègue dont l'enfant souffre d'une maladie grave.

Voici telle quelle l'explication de France Info : « Cette possibilité existe déjà dans des entreprises du secteur privé dans le cadre d'accords collectifs, mais elle n'est pas prévue dans le secteur public. (...) En février dernier, des policiers avaient voulu offrir leur RTT à un collègue dont la fille attendait une greffe de moelle osseuse à l'hôpital. Mais cette initiative avait été refusée par la direction de la police. La loi devrait régler ce problème. "Le corps médical demande que les parents soient là, mais à un moment il faut que l'on puisse le faire sans pouvoir trop perdre d'argent", explique Serge Salichon, qui a bénéficié il y a 7 ans de la générosité de ses collègues de travail pour soutenir sa fille malade d'un cancer. "J'ai trouvé ça grandiose

« Grandiose » ? On peut le dire, en effet. L'idée est partie de la (belle) histoire de Christophe Germain, un salarié de Badoit, qui a bénéficié de 170 jours de RTT donnés par ses collègues, pour pouvoir rester auprès de son fils de 11 ans, atteint d'un cancer et hospitalisé à domicile jusqu'à sa mort, à la fin de décembre 2009. Dans un bel élan de solidarité, les collègues ont renoncé à des jours de congé pour que le père puisse s'occuper de son fils sans perdre trop d'argent. Et au fait, la direction de l'entreprise, elle a aussi fait quelque chose ? Ben oui, elle a ... donné son accord (contrairement à la police, comme raconté plus haut).

La proposition de loi est venue de l'UMP (droite), et comment s'en étonner ? Si le « don de RTT » est un beau geste de solidarité, il ne concerne que les collègues, les autres travailleur/se/s. C'est emblématique des temps actuels : la solidarité, c'est juste bon entre les pauvres, entre « ceux d'en bas » en tout cas qui ne peuvent se permettre la perte de revenus, y compris dans des situation aussi dramatiques. Mais ça ne concerne absolument pas les patrons, les puissants, ni même la société tout entière. Le groupe communiste ne s'y est pas trompé, en votant contre la proposition de loi, préfèrant une logique de « solidarité universelle « . Les socialistes n'ont même pas osé, se cahcant derrière des arguties juridiques pour s'abstenir. Le gouvernement, lui, plutôt que de proposer un système public, a choisi de « s'en remettre à la sagese du Parlement ».

Et ne parlons même pas des inégalités criantes que l'application d'une telle loi va introduire, selon la taille de l'entreprise, la popularité des parents concernés ou la disponibilité des autres salarié/e/s...

C'est notre fierté, à nous Belges, d'avoir mis en place un système d'interruption de carrière pour prise en charge de personnes malades et soins palliatifs, même s'il pourrait être mieux rémunéré.


Infos à lire sur le site du Monde

Mis à jour (Jeudi, 01 Mai 2014 11:41)

 
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