Pire sans eux ? Ras-le-bol !

Je sais : aujourd'hui, s'en prendre aux syndicats, c'est tirer sur une ambulance aux pneus déjà crevés. Mais là, c'est vraiment un gros coup de colère.

 

Donc, le 7 octobre dernier, nous étions dans la rue, à l'appel des syndicats. « Nous » ce sont des syndicalistes, des militant/e/s d'associations, des citoyen/ne/s, tout cela à la fois, mais plus précisément, ici, « nous, les femmes » . On a formé un groupe, au risque de subir les agressions de certains « camarades » : insultes, mains baladeuses, pétards lancés dans nos jambes... On a marché quand même, on a chanté, on a dansé, on était là, bien présentes !

Une semaine après, le « Groupe des 10 » rend sa copie au gouvernement : un accord entre patronat et syndicats, à prendre ou à laisser, insistent les syndicats, pas une virgule à changer ou tout saute. Waou, ça doit être bien alors, de vraies avancées.

La FGTB présente l'accord à ses délégués avec un « a priori favorable ». On apprend en passant que le rôle des syndicats face à un gouvernement de droite ne serait pas de mobiliser pour combattre des projets imbuvables, mais de les « corriger ». Super, ça donne envie de redescendre dans la rue !

La CNE, elle, y voit « Une cuiller de sucre social dans le fiel gouvernemental ». Ce ne serait pas plutôt un coup de couteau dans le dos de certaines catégories de travailleur/se/s... ?

Le gros point, celui qui intéresse les médias, c'est l'accord sur les pensions complémentaires, mises en péril par la chute des taux d'intérêt. Certes, beaucoup de travailleur/se/s vont pousser un grand « ouf », parce que ce système a été fort développé ces dernières années – avec la complicité des syndicats d'ailleurs, jusqu'à oublier à quel point il est injuste : il dépend du secteur d'activité, et il n'est pas difficile de constater que les secteurs les plus féminisés sont aussi ceux où ces « avantages extra-légaux » sont les plus rares. De plus, il a surtout servi d'alternative à des hausses salariales et les « avantages » fiscaux qui y sont liés grignotent encore un peu plus la sécurité sociale et en particulier, son pilier « pensions légales ». Mais soit, avec les proportions qu'il a pris aujourd'hui, il devient de plus en plus difficile de le remettre en question.

Mais l'accord comprend d'autres points, et en particulier, l'ouverture de la chasse aux malades et aux temps partiels. Cette volonté de remettre au plus vite les malades au boulot, dans une période de chômage galopant, est à la fois dangereuse (pour la santé des personnes concernées) et absurde, voire même contre-productive : les employeurs veulent-ils vraiment voir revenir des gens qui ne sont « pas à 100% » comme on dit dans le sport ? Qui ont des prestations irrégulières – par exemple entre deux périodes de chimiothérapie ? Des déprimé/e/s, des burn-outé/e/s, capables de foutre par terre le moral de toute une équipe ?

Et surtout, ce qui aujourd'hui me décide à rompre avec trente ans de syndicalisme actif, c'est la capitulation face à ce nouveau mauvais coup contre les femmes. Je reprends en bref le résumé du Soir : « L’accord prévoit que les personnes à temps partiel touchant une allocation de l’Onem devront obligatoirement chercher à compléter leur horaire. Si elles ont moins qu’un mi-temps, elles devront aussi subir les contrôles de l’Onem et perdront leur allocation si leur recherche n’est pas suffisante. Les personnes qui ont un mi-temps ou plus devront subir au moins un contrôle tous les 24 mois » (1).

Or on sait que les temps partiels (qui touchent en écrasante majorité des femmes) sont souvent les seuls emplois proposés dans certains secteurs (commerce, nettoyage...), avec des horaires flexibles qui interdisent de chercher un emploi complémentaire... Les employeurs qui imposent ces conditions seront-ils, eux aussi, soumis à des « contrôles » et surtout, à des sanctions ? On peut toujours rêver...

Et ce n'est pas fini : dans les projets du gouvernement, il y a cette coupure de l'allocation de garantie des revenus par deux au bout de deux ans. Les syndicats vont-ils se battre (ou faire semblant) sur ce thème, avant d'annoncer qu'ils ont obtenu une avancée : l'AGR ne serait pas coupée de 50% mais de 49,5%, et au bout de 25 mois au lieu de deux ans ? Ben oui, ils auront fait le maximum pour « corriger » les projets du gouvernement.

On connaît la chanson : sans eux, paraît-il, ce serait pire. Peut-être qu'avec des oeufs (dans la tronche), ce serait mieux. En tout cas, qu'on ne compte pas sur moi pour la prochaine manif syndicale.

 

Ci joint, le communiqué de Vie Féminine

 

 

 

(1) Le Soir, 16 octobre 2015

Mis à jour (Dimanche, 18 Octobre 2015 11:36)